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ietro ne fit aucun commentaire en ce qui concernait Liv, et c'était tant mieux car Wanda avait la ferme intention de demeurer inflexible sur la question. N'en déplaise à son frère, elle ne ferait pas évoluer son discours sous le prétexte de lui faire plaisir ou que ce serait plus confortable pour lui. Aucune envie ou intention de se prendre la tête, mais il fallait tout de même être un minimum réaliste sur la question. Le mieux, donc, était sans doute d'occulter le sujet, même si cela revenait seulement, finalement, à enfouir sa tête dans le sable. Tous deux ne pouvaient qu'en avoir conscience : jouer les autruches n'était pas la solution non plus. Mais peu importe, ils pouvaient mettre de côté le sujet Liv pour le moment, ce sur quoi ils ne pouvaient pas jouer les autruches, en revanche, c'était sur leur situation présente, ces marques bleues, la maladie... Ils ne pouvaient pas se contenter d'affirmer qu'ils allaient s'en sortir, comme si de rien n'était, parce qu'ils s'en étaient toujours sortis, et présumer que ça suffirait.

Au moins, Pietro admit qu'il avait peur, effectivement, et même si elle n'aimait pas le savoir angoissé, elle aimait savoir qu'il avait tout de même conscience de l'importance de la situation. Elle savait que c'était dans sa nature que d'aborder chaque sujet avec légèreté. Et c'était bien quelque part, mais dans certaines situations, elle estimait qu'il fallait paniquer, un point c'est tout, parce que c'était une affaire de préservation et de survie. C'était prendre le risque de ne plus savoir raisonner convenablement, bien sûr, mais c'était aussi, peut-être, mieux réussir à appréhender une situation qui n'attendrait pas qu'ils s'inquiètent pour la tomber dessus.

-Je ne vais pas te mentir, répondit Wanda, sans spécialement avoir envie de se prendre une fois de plus la tête avec son frère jumeau, mais néanmoins diablement honnête. Oui, c'est un peu idiot. Surtout que j'ai pas forcément le sentiment qu'on s'en soit si bien sortis jusqu'ici, dit-elle alors. Oui, ils étaient en vie, et l'air de rien, c'était déjà beaucoup, mais pour elle, ce n'était pas un gage de victoire ou de réussite. Cela faisait des mois, des années, qu'ils semblaient vivre comme en sursis, et cette fois, c'était autrement plus concret. Je sais pas à quoi on est supposés se raccrocher. Je sais pas ce qu'on a, ajouta-t-elle alors.

Elle était particulièrement pessimiste, elle le savait pertinemment, mais elle préférait l'être, quitte à l'être trop, que de commettre l'erreur de faire preuve d'un trop-plein d'optimisme. Aucune des deux solutions n'était sans doute la bonne. Parce qu'en fait, ils n'avaient aucune solution, tous les deux. Et il faudrait qu'ils soient plus que tous les deux pour en sortir.

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anda adressa un sourire légèrement ému à son frère quand ce dernier lui assura qu'elle l'avait, lui. Oui, c'était une chose dont elle ne doutait pas, et c'était définitivement sa seule certitude dans la situation actuelle. La situation était compliquée, il n'était pas rare qu'ils se prennent la tête, tous les deux, mais quand bien même ce n'était jamais simple, quand bien même leurs vies se résumaient à un défi constant, cela n'ôtait rien au fait qu'ils s'étaient soutenus malgré tout, et ce en dépit de leurs choix et des camps qu'ils avaient décidé d'adopter tous deux. Mais si elle avait Pietro aujourd'hui, ça ne voulait pas dire pour autant qu'elle l'aurait demain, ou le jour qui suivrait. Son avenir était incertain, leur avenir était incertain. En bref, elle l'avait jusqu'au jour où elle ne l'aurait plus, et donc, forcément, ce constat n'était pas exactement ce que l'on pourrait qualifier de rassurant, loin de là.

Elle hocha la tête quand il ajouta qu'elle était là pour lui. Bien sûr que c'était le cas, mais là encore, le problème restait le même. Elle était là pour lui, jusqu'au jour où elle ne pourrait plus l'être, et elle ne pouvait pas supporter l'idée de l'abandonner : elle ne l'avait déjà que trop en temps normal, vraiment. Oui, même dans les pires moments, ils pourraient compter l'un sur l'autre, c'était effectivement la réalité, clairement. Mais c'était bien ça, le problème, en fin de compte. S'ils ne survivaient pas à cette épreuve, ça leur ferait une belle jambe de ne pas être là l'un pour l'autre. Certes, la jeune femme préférait traverser les épreuves en présence de son frère, mais cela n'empêchait clairement pas.

-Justement, tu es déjà revenu d'entre les morts, je voudrais vraiment que tu n'en prennes pas l'habitude, dit-elle alors en fixant son frère avec le plus grand sérieux à sa disposition.

D'accord, il s'en était sorti - et grâce à elle, d'ailleurs - mais ce n'était certainement pas pour autant qu'elle repartait en toute confiance, à plus forte raison qu'elle avait déjà vécu ça, elle avait déjà vu son frère mourir, et parce qu'elle avait assisté à cette situation, elle savait très bien que si Pietro mourrait, elle-même n'y survivrait pas, elle n'y survivrait pas le moins du monde.

-Je suis désolée mais moi je ne le sais pas. Je sais qu'on sera toujours là l'un pour l'autre, oui, mais ça jusqu'au jour où l'un de nous ne sera plus là, et je ne suis vraiment pas sûre qu'on puisse uniquement compter là-dessus pour s'en sortir.

Bien sûr, elle savait qu'elle se montrait passablement négative, pessimiste, mais elle n'y pouvait rien : c'était ainsi qu'elle voyait à présent les choses.

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