Charles avait vu un nombre incalculable de jeunes mutants passer les portes de son institut. Depuis le jour où il avait fondé cet institut, il y avait eu énormément de mutants qui y avaient mis les pieds et qui y avaient étudié. Globalement, on pouvait vraiment dire que l’école avait aidé beaucoup de ces mutants, qu’elle était une réussite. Mais il y avait bien évidemment quelques… ratés. À chaque fois que Charles ne parvenait pas à convaincre un jeune mutant de rejoindre son école, il le prenait comme un échec personnel. Mais c’était encore pire pour ceux qui avaient mis les pieds dans l’école et qui n’avaient pas réussi à rester, qui n’avaient pas trouvé leur place et qui avait décidé de suivre un autre chemin. Parce que la plupart du temps, dans ces conditions… eh bien, ces jeunes mutants avaient tendance à ne pas suivre un bon chemin.
C’était le cas de Isaac, ce pauvre jeune homme qui n’avait vraiment pas un pouvoir facile. Forcément, la plupart du temps, les pouvoirs jouaient grandement dans la réussite d’un mutant à intégrer l’institut, mais beaucoup de ses élèves et de ses anciens élèves devenus professeurs ensuite avaient vraiment des pouvoirs difficiles. Charles avait cru pouvoir aider ce jeune homme, sans résultat. Du moins, sans le résultat qu’il aurait voulu obtenir avec lui.
Cependant, ce n’était pas parce que Charles n’avait rien pu faire pour empêcher ce jeune homme de quitter son institut à l’époque qu’il avait décidé de baisser complètement les bras. Oh, en soit, Charles avait conscience qu’il ne pourrait surement plus rien faire pour lui, mais il se disait qu’il pouvait quand même toujours essayer de le mener un peu plus sur un chemin… droit. Il n’avait pas vraiment l’habitude de lâcher facilement l’affaire, c’était un reproche qu’on lui faisait sans doute souvent, mais qu’il n’avait pas l’intention de changer. Il ne passait pas son temps à surveiller ses anciens élèves non plus, mis il avait un peu suivi le parcourt de Isaac. Rien de bien glorieux de ce qu’il avait vu, puisque l’homme utilisait ses pouvoirs à des fins malsains pour prendre la vie d’autrui. Il comprenait que la tentation était trop forte, mais si le jeune homme était resté plus longtemps dans l’école, il aurait pu apprendre à contrôler ses pouvoirs. Enfin jeune homme, Charles donnait maintenant l’impression d’être plus jeune que son ancien élève, mais sa nouvelle apparence n’était qu’un détail à ses yeux.
Ce jour-là, puisque la situation des mutants avaient finalement pu s’arranger… non sans un certain paiement de la part des mutants, Charles avait décidé de se pencher un peu plus sur le cas de cet ancien élève. Il savait qu’il passait du temps autour d’une boite de nuit – merci le Cérébro qui lui permettait globalement d’espionner qui il voulait, quand il le voulait – il y avait donc de forte chance qu’il le trouve dans cette boite de nuit. Alors, il avait décidé de s’y rendre. Quand il arriva sur place, ce dernier n’était pas là visiblement, en tout cas il ne perçu pas son esprit dans le bâtiment. Charles s’installa au comptoir espérant que Isaac allait quand même faire un tour par ici.
saac était satisfait. En même temps, c’était facile que de l’affirmer. Isaac était toujours satisfait, terriblement et insupportablement satisfait de lui-même. Mais en même temps, pourquoi ne le serait-il pas ? Tout se passait précisément ainsi qu’il l’avait entendu et espéré, et il devait reconnaître qu’un train de vie qu’il appréciait déjà largement en temps normal avait encore gagné en saveur dès l’instant où il avait accepté de se mettre au service des Death Demons. Enfin, au service des Death Demons, l’expression était exagérée selon lui. Isaac refusait de croire qu’il puisse être au service de qui que ce soit. C’était, généralement, les autres qui se mettaient à son service. Lui, de son côté, se contentait simplement de répondre à ses envies et à ses impulsions, à sa soif de liberté. C’étaient elles qui le guidaient bien plus que n’importe quoi ou n’importe qui d’autre. Si les Death Demons devaient ne plus lui convenir, il partirait sans se retourner. S’il devait trouver son intérêt ailleurs, il n’hésiterait pas davantage. Il était libre, il se pensait libre, et c’était tout ce qui importait.
Le mutant avait, comme bien souvent, l’intention de se récompenser après une journée rondement menée, en allant s’amuser un peu au Night’s Demon. Qui sait s’il n’y croiserait pas David ? ou ne ferait pas une rencontre tout autant digne d’intérêt. Il n’était pas là pour honorer un contrat ou pour recevoir la monnaie de sa pièce, il était là pour s’amuser et rien d’autre. Mais pour cela, et avant d’envisager de se déchaîner sur la piste de danse, il avait bien envie de boire un verre ou deux. Il s’installa donc au comptoir, sans faire tout de suite attention à qui se trouvait à côté de lui et passa commande d’un verre de martini.
Ceci fait seulement, il prêta une attention plus grande à ce qui l’entourait. Si David avait toujours sa préférence, dernièrement, quand il était dans les parages, il ne crachait pas non plus sur la clientèle classique du night club, qui était bien souvent de premier choix. Il adressa un regard plus attentif à son voisin. Brun, bel homme… Isaac n’avait pas le souvenir de l’avoir un jour déjà vu. Il était bien incapable de reconnaître dans les traits de ce jeune homme qu’il trouvait tout à fait à son goût l’homme qui avait espéré faire de lui un mutant bien sous tout rapport. Dans l’esprit autocentré et jamais à la page d’Isaac, le professeur Xavier était un vieux chauve en fauteuil roulant, pas un beau jeune homme chevelu et tout à fait capable de tenir sur ces deux jambes. Tout à fait son genre, au passage. Il avait trouvé de quoi il s’amuserait le temps de cette soirée. Ou pour les minutes qui venaient en tout cas.
-Je vous offre un verre ? proposa-t-il d’entrée de jeu de son ton charmeur mais sans pour autant faire intervenir ses pouvoirs dans l’immédiat.
Que l’homme soit gay ou hétéro, c’était sans importance, il le désirait si Isaac choisissait qu’il devait le désirer. Il n’aurait tout simplement pas le choix.
Cela ne fut pas bien long avant que Isaac décide de faire son entrée dans la boite de nuit. Charles ne savait pas encore comment il allait aborder les choses, pour le moment il avait surtout l’intention de l’observer un peu plus directement qu’en utilisant cette merveilleuse machine qui lui permettait de surveiller à peu près tout le monde… dans tout le monde (vous pensez avoir une vie privée ? Pas avec Charles Xavier).
L’homme ne sût pas vraiment si le destin avait décidé de les mettre complètement sur la route l’un de l’autre, mais en tout cas Isaac décida de s’installer proche de lui au comptoir. Charles faisait comme s’il ne l’avait pas remarqué pour le moment, mais son attention était évidemment entièrement tournée vers lui, vers son esprit, vers ce qu’il désirait, ce qu’il avait l’intention de faire. Il avait conscience que le jeune homme était satisfait de sa vie, mais du point de vue de Charles… Isaac s’était définitivement perdu et il ne pouvait pas s’empêcher de se sentir responsable de ce noire chemin qu’il avait emprunté. Parce qu’il n’avait pas été capable de le sauver, de l’aider à trouver une digne voie qu’il aurait pu suivre malgré la difficulté de ses pouvoirs. Charles se sentait responsable oui, de ce jeune homme et de toutes les horreurs qu’il était capable de faire.
Enfin visiblement, le destin semblait avoir décidé qu’il allait être facile pour Charles de se retrouver sur le chemin de Isaac, puisque ce dernier décida de l’aborder. Bien sûr, l’homme avait conscience que ce dernier ne se doutait pas une seule seconde de qui il était. Ce qu’il ne pouvait pas lui reprocher, il appréciait assez l’effet que cela faisait de ne pas être reconnu de suite et… eh bien, d’apprendre aux autres qui il était et de constater leur réaction. Mais il n’avait pas l’intention de faire une telle révélation trop rapidement non plus.
« Eh bien, avec plaisir. » Répondit-il donc aux avances de l’homme. Charles avait bien compris ce qu’il cherchait et forcément, au vu de la situation le mutant avait aussi tout à faire conscience qu’il devait se montrer particulièrement prudent. Les pouvoirs de Isaac était tout aussi puissant que dangereux. Charles osait croire qu’il avait la force nécessaire pour s’en sortir, mais il n’avait pas non plus envie de trop tenter le diable. « Vous venez ici souvent ? » Demanda-t-il alors, dans le but de continuer cette entrée en matière et d’aller dans le sens du jeune homme.
En le laissant croire qu’il n’aurait aucun mal à l’aborder donc, pour qu’il ne se donne pas trop d’effort dans le but d’obtenir gain de cause de son côté. Pour le moment Charles allait se contenter de cette entrée en matière, mais il avait quand même bien l’intention d’aborder des sujets fâcheux assez rapidement. Il savait que détourner Isaac du chemin qu’il avait choisi n’allait pas être du tout facile, qu’il n’allait pas manquer de marquer son opposition. Mais Charles ne reculait pas devant les difficultés.
saac ne jouait pas de ses pouvoirs avec tant d'énergie que cela quand il sentait que son interlocuteur était réceptif. S'il prenait plaisir à savoir n'importe qui à sa merci pour peu qu'il le décide, il aimait bien ne pas céder à la faciliter et constater les effets de son charme naturel, qui s'épargnaient qu'il se serve trop avant de ses capacités extraordinaires. C'était bien pour cela qu'il avait fait de David son défi personnel et n'avait jamais cédé à la facilité de l'envouter, par exemple. L'homme ne réagissait pas avec cette réserve que d'autres hommes affichaient parfois, comme si le fait d'être abordés par un homme allait d'un seul coup anéantir toute leur virilité. Non, il semblait plutôt enclin à la discussion et au fait de faire connaissance, et cela arrangeait bien le mutant. L'homme non plus ne devrait pas le regretter, si tout se déroulait bel et bien selon son bon vouloir, et il avait envie de croire que c'était effectivement possible, et plus qu'envisageable, même. D'un geste assuré de la main, Isaac héla le serveur au comptoir.
-Un whisky pur, s'il vous plaît, et... Il jaugea son interlocuteur avant de décider de son choix de boisson à sa place, un martini pour monsieur.
Il avait une tête à boire des martinis. Ou peut-être pas. Dans tous les cas, c'était trop tard, et le contenu de sa boisson n'était pas le plus important. L'alcool accompagnait agréablement toute conversation, mais Isaac n'avait pas besoin de déshiniber ses interlocuteurs pour qui'ls lui tombent dans les bras, alors il n'y comptait pas vraiment.
-Je viens suffisamment régulièrement pour être certain que vous n'êtes pas un habitué. Dans le cas contraire, je vous aurais immédiatement remarqué, ajouta-t-il tandis qu'on déposait leurs verres sous leurs nez. Le mutant but une gorgée de son verre avant de reprendre la parole. Ce genre d'ambiances ne sont pas celles que je préfère, mais la musique n'est pas déplaisante, si jamais vous aimez danser. Nouvelle pause. Au fait, je m'appelle Isaac.
Il avait l'habitude de ce genre de conversations. A force d'accoster des inconnus au comptoir des bars, il savait exactement quoi dire, quand le dire et comment le dire. Ce genre de mécaniques n'avaient pas le moindre secret pour lui, définitivement aucun secret. Il savait quels mots dire, comment les dire, quels sujets aborder, quelles inflexions de voix utiliser. Des efforts qui n'étaient pas forcément nécessaires puisque ses pouvoirs lui permettaient d'agir à peu près n'importe comment et d'obtenir gain de cause malgré tout. Mais cela faisait partie du jeu, un jeu dont il connaissait les règles sur le bout des doigts, si bien qu'il se plaisait à les changer de temps à autre. Un jeu qui n'appartenait qu'à lui.
Isaac décida de commander pour eux deux, Charles de son côté décidait de tout simplement le laisser faire pour le moment. Il avait un peu d’expérience à force, il savait parfaitement que s’il abordait les choses trop frontalement, ses interlocuteurs avaient tendance à se braquer et connaissant un peu Isaac – même s’il ne l’avait pas revu depuis qu’il avait quitté l’institut –, il était fort à parier que ce dernier se braquerait directement s’il découvrait la raison de sa présence ici. Même si à un moment donné, il faudra bien qu’il le découvre et il y avait peu de chance qu’il apprécie également que Charles ne lui ait pas dit directement toute la vérité.
Mais le Professeur X avait besoin de prendre le temps de sonder un peu son interlocuteur, d’en savoir plus sur ce qu’il devenait. Et au fond, il ne pouvait pas nier non plus qu’il s’amusait quand même un peu de cette situation. Ce qu’il vivait et le fait qu’on ne le reconnaisse pas de suite, il ne le vivrait qu’une fois (normalement), alors oui, il trouvait ça quelque peu amusant. En tout cas, Charles se retrouvait donc avec un martini devant lui, et un Isaac qui continuait la conversation lui apprenant qu’il venait régulièrement dans cet endroit. Charles savait pour quelle raison il venait ici, du moins en partie, il savait que le mutant faisait usage de ses pouvoirs à des fins qu’il ne pouvait évidemment pas cautionner de son côté. Tellement de chose gâché de sa part, l’utilisation si trivial de ses pouvoirs.
« Enchanté Isaac. » Répondit Charles, sans prendre la peine de son côté de donner son nom. Oh, l’homme pourrait très bien se présenter, comme il pourrait aussi donner un faux nom, mais il n’était pas encore complètement décidé de la marche à suivre qu’il allait adopter. Cela dit, il prit quand même la peine de boire une gorgée de martini, puisqu’il avait le loisir de se faire payer un verre. Ses années de légèreté étaient lointaines à présent, même s’il avait techniquement fait un sacré retour en arrière dans le temps. « Je vous avoue que l’ambiance de cet endroit n’est pas réellement ce que j’affectionne le plus. J’ai tendance à être un peu plus… vieux jeu. » Charles n’avait vraiment aucune idée d’où il était réellement en train d’aller avec cette conversation, mais l’idée était bien sûr que cette conversation dure le plus possible. « Et qu’est-ce qui vous amène dans ce genre d’endroit, si l’ambiance n’est pas celle que vous préférez ? » Demanda-t-il, dans le but de pousser Isaac à parler de lui.
Cela dit, Charles ne pensait pas que le jeune mutant allait se confier sur ce qu’il faisait réellement non plus, même si ce dernier semblait être du genre à aimer jouer avec le feu. Charles devait bien avouer qu’il était quand même curieux de la manière dont ce dernier allait lui répondre.
saac adressa à son interlocuteur son sourire le plus charmeur quand ce dernier lui dit être enchanté de l'avoir rencontré. Ce n'était jamais qu'une formule d'usage, bien évidemment, mais ce n'était pas entré dans l'oreille d'un sourd néanmoins. Il appréciait toute marque d'intérêt de la part de son interlocuteur si elle pouvait laisser suggérer que ce dernier était potentiellement intéressé. Et il devait l'être, non ? En tout cas, il n'affichait aucun signe de rejet, et il n'en fallait naturellement pas davantage au mutant pour tenter de s'engouffrer dans la brèche, d'une manière ou d'une autre.
Lui aussi devait admettre ne pas apprécier complètement l'ambiance de ces lieux, et cela n'étonnait qu'à moitié Isaac. Il n'y avait pas à le regarder longtemps pour observer qu'il détonnait dans le décor, et c'était d'ailleurs parce que cela détonnait dans le décor qu'Isaac avait trouvé tant d'intérêt à son interlocuteur. Il ne savait pas si cet intérêt allait diminuer ou non, il aurait tendance à penser qu'il n'irait qu'augmentant. Il y avait quelque chose d'intrigant chez ce jeune homme : le seul fait qu'il n'ait pas daigné se présenter en retour, déjà, en disait bien évidemment long, et Isaac en retirait les conclusions qu'il estimait s'imposer.
-Je n'aime peut-être pas l'ambiance, mais on peut souvent y faire des rencontres intéressantes, observa-t-il en adressant un regard des plus appuyés à son interlocuteur. Et à l'évidence, je ne me suis pas trompé aujourd'hui, reprit-il sans hésiter le moins du monde. Oui, sa manière d'aborder autrui avait toujours eu tendance à être franche et directe, mais après tout, il ne voyait pas pourquoi il tournerait autour du pot : surtout qu'en fin de compte, il finissait toujours par obtenir exactement ce qu'ils voulaient. Et vous alors, qu'est-ce qui vous a amené ici ? La curiosité ? suggéra-t-il en lui adressant son regard le plus chaleureux et appuyé.
A présent, il ne le lâchait pas des yeux. Il était curieux d'en apprendre plus au sujet de cet homme. Il sentait bien qu'il y avait plus à découvrir à son sujet que ce que l'on pouvait observer de manière des plus évidentes. Il pouvait parler de lui s'il le fallait, mais il ne voulait pas être le sujet de discussion principal ici et maintenant, il avait même dans l'idée que ce serait forcément contreproductif. Il avait sa méthode bien calculée, bien intégrée, et il n'avait pas spécialement envie d'en dériver.
-Au fait, vous ne m'avez toujours pas dit votre nom.
C'était peut-être un simple oubli, mais ce n'était pas passé inaperçu aux yeux d'isaac, qui tenait d'autant plus à découvrir à qui il pouvait bien avoir affaire exactement.
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Dim 11 Oct - 12:30
